Comment sauver son enfant d’une mort certaine ?
Faut-il, comme le croit le père de l’auteur, faire confiance à l’école afin qu’elle obtienne un «beau diplôme»?
Ainsi elle ne serait plus ni hutu ni tutsi : elle atteindrait le statut inviolable des «évolués».
C’est justement pour obtenir ce certificat que l’auteur sera obligée de prendre le chemin de l’exil.
Elle passera de pays en pays, au Burundi, à Djibouti puis en France. Tantôt les chances que lui promettait ce précieux papier apparaissent comme une certitude, tantôt elles se volatilisent tel un mirage. Comme le lui avait dit son père, ce «beau diplôme» sera le talisman, toujours source d’énergie, qui lui permettra de surmonter désespérance, désillusions et déconvenues.
L’auteur revient ici à la veine autobiographique, avec ce style fluide, plein d’humour et de fantaisie qui rend passionnant le récit de ses souvenirs, si douloureux soient-ils parfois.
Animation : Alexis Scheppler.
© Texte : scholastiquemukasonga.net | Photo : Marie THIÉRY
Récit.
La romancière rwandaise Scholastique Mukasonka vient de sortir, courant mars 2018, son 7e ouvrage : « Un si beau diplôme ! ».
Pourquoi avoir choisi ce titre ?
Depuis les années 60, son père encourageait Scholastique Mukasonka, 5e enfant de la fratrie et bonne élève, à passer un diplôme – quel qu’il soit, pour espérer un avenir meilleur.
A cette époque déjà, le peuple Tutsi dont ils sont originaires, était discriminé et persécuté (maltraitance, massacres…).
Obtenir un diplôme, c’était obtenir un talisman : un passeport pour sa survie.
Beaucoup de Tutsis à ce moment-là ont dû se réfugier dans les pays frontaliers (Burundi, Tanzanie, Ouganda…).
C’était une question de Vie ou de Mort !
Certains Tutsis, dont Scholastique Mukasonka et sa famille, ont été déplacés à Nyamata, au Sud Ouest du Rwanda, une région inhabitable, connue pour être hostile et infestée par la mouche tsé tsé.
« La Nature aurait dû faire naturellement le travail. » Mais ils ont survécu.
Tandis que sa mère cherchait en permanence des cachettes et des abris pour mettre sa famille en sécurité, son père a toujours persisté et insisté pour que ses enfants aient des « diplômes ».
Des diplômes pour ne pas mourir.
Des diplômes pour sauver la mémoire de « ceux qui allaient mourir sous la machette ».
Le Rwanda est l’un des pays d’Afrique où beaucoup de missions catholiques ont été construites.
Les enfants étaient scolarisés jusqu’à la 6e année de primaire, et passaient l’Examen National de fin de cycle.
Un quota était imposé : seuls 10% des élèves Tutsis l’obtenaient.
A sa grande surprise, Scholastique Mukasonka réussit cet Examen National.
La validation de cet examen lui permettait d’accéder au cycle secondaire et surtout d’entrer dans une nouvelle catégorie, celle des « évolués » : « ni Hutus, ni Tutsis » !
Ne se sentant pas meilleure que ses camarades, Scholastique Mukasonka se sent très chanceuse et se sent alors investie d’une mission : le devoir d’aller jusqu’au bout.
Elle ne fait qu’un seul choix d’orientation : Assistante Sociale.
Elle effectue son cursus dans un lycée de jeunes filles.
Récit dont elle s’inspire dans son 4e roman Notre-Dame du Nil, paru en mars 2012 (Prix Renaudot 2012, Prix Ahmadou Kourouma 2012).
Société divisée et tensions omniprésentes, Scholastique Mukasonka est à nouveau en danger et doit quitter l’école d’assistantes sociales de Butare en 1973 pour s’exiler au Burundi.
Informations.
QUAND
Le 27/04/2018 à 17h00
LIEU
Librairie Kléber
Salle Blanche
STRASBOURG
ORGANISATEUR
Librairie Kléber
TARIF
Entrée libre